Travailler sous 35°C : ce que dit vraiment la loi

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Quand le thermomètre grimpe en flèche, travailler dehors ou dans un atelier devient un vrai défi. Pour les pros du BTP, de la logistique ou de l’industrie, la chaleur est un risque bien réel. Mais que prévoit la loi en cas de températures extrêmes ? Existe-t-il une limite au-delà de laquelle on peut légalement cesser le travail ? Et surtout, quels sont vos droits en tant que salarié ?

Les fortes chaleurs : un risque bien concret pour les pros

À partir de 30 °C, le corps commence à fatiguer. Quand on dépasse les 35 °C, surtout avec une activité physique intense, les risques se multiplient : déshydratation, coups de chaleur, étourdissements… Les conditions deviennent difficiles, voire dangereuses.

Les métiers de terrain sont les plus exposés. Sur un toit, dans une cour de chantier ou dans un entrepôt mal ventilé, la chaleur ambiante peut dépasser les 40 °C ressentis. Et pourtant, chaque été, des milliers de travailleurs continuent leurs missions sans dispositif particulier.

Ce que dit la loi… et ce qu’elle ne dit pas

Surprise pour beaucoup : le Code du Travail ne fixe aucune température maximale au-delà de laquelle le travail doit s’arrêter. Contrairement à d’autres pays européens, il n’existe pas de seuil officiel interdisant l’activité en cas de forte chaleur.

Pour autant, l’employeur n’est pas libre de faire comme bon lui semble. La loi impose une obligation générale de sécurité (article L4121-1), ce qui signifie qu’il doit adapter les conditions de travail aux risques, y compris en période de canicule. Cela inclut l’aménagement des horaires, la mise à disposition d’eau potable, ou encore l’ajustement des tâches pour éviter les efforts physiques trop importants aux heures les plus chaudes.

L’INRS, organisme de référence en matière de prévention, conseille même d’interrompre l’activité si la température corporelle des travailleurs dépasse 38 °C, ce qui peut arriver rapidement sans mesures adaptées.

Le droit de retrait : une option légale

Le droit de retrait est peu connu mais fondamental. Si vous jugez que votre santé est en danger du fait de conditions de chaleur extrême, vous pouvez légalement cesser de travailler, sans attendre une autorisation. Ce droit s’exerce individuellement, et doit être motivé par un danger grave et imminent.

Dans ce cas, il est essentiel d’informer son supérieur hiérarchique immédiatement et de rester disponible sur place si la situation le permet. L’employeur n’a pas le droit de sanctionner un salarié qui exerce ce droit de bonne foi, même si, par la suite, le danger n’est pas confirmé.

Dans certaines affaires récentes, la justice a reconnu que le manque de mesures face à la canicule justifiait l’exercice du droit de retrait.

Les obligations concrètes de l’employeur pendant la canicule

Même en l’absence de température maximale définie, l’employeur a des responsabilités bien réelles. Il doit anticiper les vagues de chaleur et mettre en place des mesures spécifiques : horaires décalés, pauses plus fréquentes, matériel adapté à la saison, ou encore installation de zones d’ombre et de ventilation.

Des guides pratiques sont publiés chaque année par des organismes comme l’OPPBTP, la CARSAT ou l’INRS pour aider les entreprises à agir en amont. Certains secteurs professionnels imposent même des protocoles spécifiques pendant la période estivale, notamment dans les travaux publics.

Si ces précautions ne sont pas prises et qu’un incident survient, la responsabilité de l’employeur peut être engagée. En cas d’accident lié à la chaleur, la faute inexcusable peut être retenue s’il est prouvé qu’il connaissait le risque sans avoir pris les mesures nécessaires.

L’activité partielle, un recours possible en cas de canicule extrême

Dans des cas exceptionnels, lorsque la chaleur rend le travail véritablement impossible, l’entreprise peut demander un recours à l’activité partielle (ex-chômage technique). Ce dispositif permet de suspendre temporairement l’activité, avec une indemnisation partielle des salariés.

Ce recours reste rare, car il doit être justifié par des éléments précis : situation géographique, nature des tâches, horaires impossibles à adapter, absence de solutions techniques viables… Mais il constitue une option légale, notamment en cas d’alerte canicule rouge.

Travailler sous 35 °C n’est pas interdit par la loi, mais cela ne signifie pas que tout est permis. Les employeurs ont une responsabilité claire : adapter les conditions de travail, protéger les salariés, et ne pas minimiser les risques liés à la chaleur.

En tant que professionnel, connaître vos droits est essentiel. Vous avez le droit de réclamer un aménagement en cas de chaleur excessive. Vous avez le droit de refuser de travailler si votre sécurité est menacée. Et vous avez le droit d’attendre que votre santé soit une priorité, même en plein été.

Olivier - Connaisseur du Code du Travail
Olivier - Connaisseur du Code du Travail

Juriste spécialisé dans le droit du travail, Olivier met son expertise au service des travailleurs manuels. Avec une carrière riche en expériences auprès de grandes entreprises et syndicats, il décrypte pour vous les subtilités du code du travail. Olivier est votre allié pour comprendre et naviguer habilement dans le monde complexe des réglementations professionnelles.

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